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VOUS PEIGNEZ À L’HUILE, UNE TECHNIQUE PLUTÔT "ACADÉMIQUE",SUR DE GRANDS FORMATS, DES SUJETS QUI METTENT EN JEU UNE CERTAINE POÉSIE DU QUOTIDIEN. COMMENT CE MODE D’EXPRESSION INTERAGIT-IL AVEC VOTRE VOLONTÉ DE RÉVÉLER L’ANODIN?

J’ai une pratique "classique" de la peinture, c’est vrai. Je suis ce qu’on appelle un peintre de chevalet, avec tout ce que cela implique comme bonnes et mauvaises connotations. Mais je l’assume. J’éprouve un très grand plaisir dans l’instant de la réalisation. Mon oeil se focalise et suit le bout du pinceau qui lisse la matière sur la toile, je plonge dans un état second de concentration. J’aime être aveuglée par ce que je peins. Le temps semble suspendu, pourtant il défile. Je me trouve dans une situation où je m’oppose dans ma pratique laborieuse à la caractéristique de notre époque qui cherche à aller plus toujours plus vite et qui finit par se déconnecter de la réalité. C’est cette réalité, ce quotidien qui me captive, comme l’ont été bien d’autres Grands avant moi, Caspar David Friedrich, Gilles Aillaud, Peter Doig.....
Je ne parlerais cependant pas de poésie, même si la couleur, le soigné et l’apparence lisse peuvent y faire penser, et je ne cherche pas à réenchanter le quotidien. Mon travail fait plutôt état d’un sentiment d’inquiétude et de vide. La mélancolie semble être le terme plus approprié. Je suis préoccupée par des sujets sombres, et me sens d’humeur à renouer avec la tradition et le sérieux en revisitant la nature morte et l’étude de paysage.

VOUS CHOISISSEZ DES MOTIFS ET DES THÈMES QUI ONT TRAIT AVEC VOTRE RÉGION D’ORIGINE. QUEL SENS DONNEZ-VOUS À CETTE DÉMARCHE?

Je crois que pour être juste, je puise mon inspiration dans un univers proche en toute simplicité. Je prends garde à ce qui m’entoure, alors que d’autres s’en détachent, à force d’y vivre. Je me nourris du passé riche de cette région,de mouvement comme L’Ecole de Nancy, de l’iconographie des Émaux de Longwy par exemple. Je ne cherche pas à m’extraire de mes origines mais je les cultive, à tort ou à raison?
Je suis une provinciale sans espoir d’eldorado qui a pour décor quotidien une centrale nucléaire.

LORS DE VOTRE RÉSIDENCE À BERLIN, QUELLES PISTES AVEZ-VOUS EXPLORÉES ET QUEL AVAIT ÉTÉ VOTRE PROJET DE DÉPART?

Le projet débute en Moselle avec "Paysages d’Hiver" et se poursuit à Berlin. Il s’agit d’une étude sur le paysage. Alors qu’ à la campagne l’intrusion de bâtiments dans le décor,constructions aléatoires posées au milieu de territoires vastes et plats, interpelle le regard et y réduit la place de la nature environnante; à Berlin celle-ci semble cette fois s’approprier la ville. Les indésirables, mauvaises herbes, plantes aromatiques et sauvages y prolifèrent. Je prends le temps de parcourir une partie de cette ville immense à pied. Ce qui m’a permis de découvrir cette curiosité berlinoise que je nomme "paysage d’intérieur": habitants et commerçants recréent une monde sur le rebord de leur fenêtre ou dans la vitrine de leur commerce ,amoncellement de plantes, faïences, objets divers...le tout bien ordonné ou pas, nature inerte, paysage à échelle réduite qui s’offre au passant attentif.
J’archive les images collectées, s’en suit une sélection, et la réalisation d’une série de toile à l’huile. Les conditions exceptionnelles qu’offre cette ville en terme d’espace m’ont permis de redimensionner mes tableaux à la taille de mon atelier Berlinois.

DANS QUELLES DIRECTIONS S’ORIENTENT VOS TRAVAUX ACTUELLEMENT ET QUELS SONT VOS PROJETS?

Je développe parallèlement à mon projet de résidence une série de dessins au crayon de couleur qui prend la forme d’un cabinet de curiosité; bestiaire imaginaire, créatures hybrides à la fois animales, végétales, minérales ou issues d’objets qui mettent l’accent sur nombres de dérives expérimentales; défendant une vision animiste du monde selon laquelle chaque éléments naturel possède une âme.
Je présente un projet d’installation comestible pour les Nuits Blanches à Metz. Je trouve important d’alimenter ce pendant éphémère de mon travail au coté pérenne de ma peinture.
Ces derniers temps, je suis attirée par l’édition. C’est peut-être ma façon de concevoir l’objet, le multiple. Je travaille sur un ouvrage léger, un recueil de photographies.
Le caractère éclaté que semble prendre les oeuvres de ces dernières lignes exprime au contraire un désir d’unité, par la multiplication des formes je tente d’illustrer mon appréhension du monde.
Pour le moment, ma résidence n’en est qu’à ses débuts, je pense encore y consacrer du temps.

Entretien avec Hélène Doub, Chef du Service des Actions Culturelles Extérieures et des Expositions Temporaires du Département de la Moselle.

Catalogue Blitz, Biennale d’art contemporain, Artistes en résidence à Berlin, Metz 2009.